D’une enfance de jeune comédienne, Lucile Boulanger a gardé un goût et un plaisir à modeler le discours, à phraser les émotions. C’est cette justesse même que l’apprentissage précoce de la viole de gambe vient accentuer : épaulée par ses professeurs (Ariane Maurette, Christine Plubeau, Jérôme Hantai, Christophe Coin), Lucile s’immerge dans l’ascèse joyeuse requise par la viole. Son exigence lui ouvre les portes du CNSM de Paris, dont elle sort en 2009 avec les plus hautes distinctions, et se voit récompensée de plusieurs prix internationaux (Concours Bach-Abel de Köthen, Società Umanitaria de Milan, Musica Antiqua de Brugge).
Affûtant sa pratique sur différentes pierres, Lucile Boulanger trouve autant de bonheur à mêler la voix de sa viole aux polyphonies du consort (L’Achéron, Ricercar Consort, Musicall Humors) et au continuo opératique (Pygmalion, Correspondances, Les Talens Lyriques, etc…), qu’à l’exercice rigoureux du récital en France et à l’étranger. Tantôt accompagnant, tantôt accompagnée, ses collaborations avec les interprètes les plus en vue nourrissent son imaginaire et sa curiosité (Philippe Pierlot, Christophe Rousset, Justin Taylor, Claire Lefilliatre, Lucile Richardot, François Lazarevitch, Alexis Kossenko, etc…).
Ses enregistrements (Sonates de Bach ou C.P.E. Bach-Graun-Hesse avec Arnaud de Pasquale) sont salués par la critique et font l’objet de nombreuses récompenses (Diapason, fffff, Choc de Classica, Coup de Coeur Charles Cros). Son dernier disque consacré à Forqueray et à des transcriptions de sonates italiennes de violon fait dire à la critique « tantôt, c’est l’énergie qui vous bouscule, tantôt la caresse qui vous fait frissonner, tantôt l’émotion nue qui vous bouleverse, mais c’est partout la même justesse, la même densité. ». Le BBC Music Magazine juge ce dernier disque « irrésistible », et compare sa liberté de jeu à celle de Jacqueline du Pré.
A contre-courant d’une sédimentation des pratiques actuelles de la musique ancienne, Lucile Boulanger se refuse à ne voir en la viole que le vaisseau d’une tradition esthétique révolue. Aussi ses projets en cours visent-ils à étoffer et émanciper le répertoire contemporain de la viole, en passant commande d’oeuvres et en faisant la part belle dans ses programmes à celles qui existent déjà (notamment chez Hersant). Des compositions lui sont d’ores et déjà dédiées.
© Robin Davies
« Musicienne racée, d’une élégance déliée, son instinct et son exigence se perçoivent à chaque note. »