De retour sur la scène du Festival 1001 Notes le 25 juillet 2023 avec le spectacle Folia, le chorégraphe Mourad Merzouki nous parle de sa trajectoire artistique et de son approche singulière et plurielle du hip-hop. Grâce au mélange des styles, il fait de cette danse, longtemps circonscrite aux milieux populaires ,un art majeur du paysage chorégraphique français. Entretien.
Vous avez expérimenté de nombreuses disciplines: cirque, arts martiaux, hip-hop… Qu’est-ce qui vous a poussé à choisir de faire carrière dans la danse ?
J’ai été séduit par le spectacle vivant de manière générale. J’ai commencé par une école de cirque, ce qui fût ma première connexion avec le public. Ensuite, j’ai découvert le hip-hop dans les années 80, ce qui m’a progressivement amené à créer des spectacles autour de l’art chorégraphique. Les arts martiaux, que j’ai surtout pratiqués en étant enfant, qui ont contribué à ce cheminement atypique jusqu’au monde de la danse.
« Mes créations sont à la croisée des disciplines »
En tant que chorégraphe, vous aimez mélanger les genres (arts visuels, musique classique, hip-hop…) Qu’est-ce que ce procédé vous apporte dans votre création?
J’aime l’idée de créer des croisements, des dialogues inattendus entre les genres et les univers. C’est une manière d’abolir les frontières entre eux, de les rendre poreux les uns aux autres. La danse se nourrit des différents arts vivants, et mes créations sont à la croisée des disciplines.
Quel est votre rapport à la musique classique ? Pensez-vous que la rapprocher d’autres styles est une manière efficace de la rendre plus accessible?
Petit, je n’allais pas au théâtre. J’ai connu la musique classique tardivement et quand je vois les bienfaits que cela m’apporte, j’ai envie de la partager avec le plus grand nombre. Je m‘adresse à tous les publics, mais je suis d’autant plus heureux si j’arrive à intéresser à la danse des spectateurs qui n’y sont pas habitués.
J’aspire à ce que chacun de mes spectacles soit un florilège de danses, de musiques et d’interprètes, c’est une prise de risques qui me permet de rendre plus accessibles à la fois la danse et la musique classique.
« Le hip-hop fait aujourd’hui partie intégrante du paysage chorégraphique français et c’est une vraie réussite. »
Vos créations sont audacieuses. Quel est votre plus grand défi en tant que chorégraphe ?
Créer une nouvelle oeuvre est toujours un défi, ne serait-ce que celui d’emmener une équipe et un public vers un projet qui ne ressemble pas au précédent. Le plus important est de continuer à surprendre, tant pour soi-même que pour les interprètes et les spectateurs.
Depuis que j’ai commencé à chorégraphier des spectacles, l’un des défis principaux à relever a été d’amener la danse hip hop de la rue à la scène. Autrefois considéré comme une danse de rue et un effet mode, le hip-hop fait aujourd’hui partie intégrante du paysage chorégraphique français et c’est une vraie réussite.
Vous êtes déjà venu plusieurs fois à Limoges pour le Festival 1001 Notes, pouvez-vous nous parler de cette expérience? Trouvez-vous que la ville soit une source d’inspiration de part sa localisation, son patrimoine ?
De manière générale, on ne passe pas assez de temps dans les villes au cours des tournées. Il faudrait être invité plus longtemps pour avoir le temps de s’en imprégner. A Limoges, je sens que je m’adresse à un public bienveillant et différent de celui dont j’ai l’habitude dans mes tournées, où je suis accueilli par un public de danse averti. Le Festival 1001 Notes, c’est d’abord un festival de musique, qui m’amène à élargir mon travail. Je peux donc toucher un public que je ne toucherais peut-être pas si je le présentais uniquement dans mon réseau danse.
« (…) j’avais l’impression que le hip-hop était une danse enfermée dans une cage, qu’elle n’évoluait qu’au sein des quartiers populaires. Mon rêve était donc de l’en faire sortir. »
Vous êtes directeur de la compagnie Käfig, qui signifie en allemand « la cage ». Pouvez-vous nous parler un peu de ce choix de nom pour une compagnie qui aspire justement à s’affranchir des cadres traditionnels ?
C’est un terme qui m’inspirait à une époque où j’avais l’impression que le hip-hop était une danse enfermée dans une cage. Elle n’évoluait, en effet, qu’au sein des quartiers populaires. Mon rêve était donc de l’en faire sortir, avec un spectacle qui traitait de l’enfermement. Käfig était donc un contre-pied sur mon état d’esprit. Cela reflétait ce que j’avais envie de construire par la suite, sous le signe de l’envol et de la liberté.
Pour terminer, quel est votre prochain projet qui vous réjouit le plus ?
J’ai deux projets très passionnants avec les Jeux Olympiques. Je suis chargé de chorégraphier le ballet de l’équipe de France de natation synchronisée et la « Danse des Jeux », qui sera reprise dans les fan zones tout au long de l’événement.
Propos recueillis par Morgane Gander
Découvrez le teaser du spectacle Folia