Critique d’Alain Lompech pour le magazine Classica
Gaspard Dehaene choisit, lui, la voie royale du grand Chopin classique, celui d’Arthur Rubinstein, de Vlado Perlemuter, de Dinu Lipatti, de Nikita Magaloff, de Nelson Freire ou encore de Stefan Askenase.
L’épreuve Chopin n’est pas une mince affaire pour un jeune pianiste.
Comme Mozart, ce compositeur révèle les esprits compliqués comme les âmes desséchées. Mais s’en tenir à un Chopin mille fois entendu, sorte de synthèse de ce que les œuvres jouées nous disent depuis des décennies, est prendre le risque de se confondre avec le mur gris devant lequel s’allonge la liste des perdants.
Gaspard Dehaene choisit, lui, la voie royale du grand Chopin classique, celui d’Arthur Rubinstein, de Vlado Perlemuter, de Dinu Lipatti, de Nikita Magaloff, de Nelson Freire ou encore de Stefan Askenase.
Il joue simple, grand, large, chantant, d’une façon qui laisse s’exprimer la musique.
La Ballade n°4 est ainsi idéale par sa façon d’avancer souplement et ferme ment, avec une clarté qui ne fuit pas les ombres, mais paradoxalement les montre. Les Mazurkas, d’un équilibre parfait, ne dansent pas plus exagérément qu’elles ne rêveraient de façon trop nostalgique. La Barcarolle se montre exemplaire dans sa conduite, ses nuances, l’enchaînement des épisodes, son naturel. Sa Polonaise en fa dièse mineur est épique, subtilement conduite quelle œuvre trop délaissée!
Que manque-t-il alors à cet admirable disque pour être inoubliable? Dehaenene se cache-t-il pas trop derrière une musique qui demande à aller au-delà de la perfection formelle, au-delà de l’intégrité sans pour autant s’en détacher, une musique qui exige de s’exprimer à travers une sonorité plus dense, plus soutenue?
Alain Lompech