Je n’ai jamais vu d’aurores boréales. Le dictionnaire les définit comme un « phénomène lumineux caractérisé par des voiles extrêmement colorés dans le ciel nocturne. »
Ainsi, le programme de ce disque m’est apparu, venu de loin et pourtant familier, comme la résurgence d’une mémoire souterraine.
Boréales est le fruit d’une fascination enfantine pour le silence de la neige qui tombe et les contrées polaires. Une arrière-grand-mère suédoise, dont je porte le prénom, m’aurait-elle aussi transmis un peu de son âme scandinave ?
Puis, aux hasards de la vie, ont surgi des évènements toujours fortuits, mais qui chaque fois ont pris la dimension de véritables rencontres : musiques, voyages, collègues… Jusqu’à mon propre violoncelle, ramené de Suède un jour de novembre 2014. Les hasards sont parfois des rendez-vous à reconnaître et ne pas manquer. Les guetteurs d’aurores boréales en savent quelque chose…
Cet album s’est tissé au fil d’une longue traversée dont je rapporte aujourd’hui quelques images sonores. Paysages intérieurs, lointaines réminiscences, ces musiques nous interrogent sans paroles et sans jugement. En les jouant en concert, j’ai remarqué qu’elles partageaient une fraternité dans leur forme cyclique : ni tout à fait la même ni tout à fait différente, une voix initiale nous revient toujours, comme polie par la marche du temps.
Boréales souhaite témoigner d’un répertoire pour violoncelle seul encore confidentiel hors de ses frontières. Chacune de ces œuvres est un hommage puissant à cet instrument, explorant à l’infini ses possibilités expressives. La plupart de ces
compositeurs sont souvent qualifiés de « mystiques », en raison de leurs évocations religieuses. Mais avant tout, c’est à l’Homme qu’ils s’adressent. Au paradis et à l’enfer de notre monde. Et au silence, d’où vient et retournera chaque note de musique.